La deuxième vie d'une légende du XV

Franck Tournaire
Franck Tournaire a tout connu au rugby à XV : de ses débuts entre copains, à Sallèles-d’Aude, jusqu’à la victoire contre les All Blacks de Jonah Lomu en 1999, le Brennus avec le Stade toulousain ou les combats de Fédérale 1 avec l’USC. Après sa carrière, ce pilier de légende a su transformer l’essai de sa reconversion. Il tient aujourd’hui une des tables qui comptent à Narbonne, Chez Franck. Retour sur un parcours hors norme.

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Votre vie a été marquée par le rugby. Comment s’est effectuée votre reconversion dans la restauration ? 
Franck Tournaire. Je devais acheter un restaurant quand je jouais au Stade toulousain, mais cela ne s’était pas fait. Alors quand Jo Gonzalez* a décidé de passer la main il y a quatre ans, nous avons saisi l’occasion avec mon associé Philippe Nougaret. Le resto de Jo était une affaire familiale, qu’il tenait avec ses filles, ça le reste aujourd’hui. Je n’avais connu jusque-là que les stades, les bus et les salles de musculation. La restauration m’offre une autre façon de vivre et j’aime ce contact avec les gens. Comme dans le rugby, il ne faut rien lâcher. C’est un métier dur, il faut toujours avoir l’envie et se remettre sans cesse en question. 

Le rugby vous manque-t-il ? J’ai passé beaucoup de temps sur les terrains et j’ai évolué au haut niveau, alors oui, je peux dire que cela me manque. Quand je suis sur le canapé et que je regarde un match, je voudrais jouer. Mais à 50 ans, mon corps ne dit pas la même chose. Ce qui est sûr, c’est que le sport fait partie de ma vie. 

Quel souvenir vous a le plus marqué ? J’en ai forcément plusieurs. Mon premier match avec les Bleus lors du Tournoi des Cinq Nations au Parc des Princes en 1996 contre l’Irlande. Bien sûr, le plus beau reste sans doute la finale de la Coupe du monde 1999 et notre victoire en demi contre les All Blacks. Tout le monde nous promettait l’enfer et ça a été l’inverse. Nous aurions voulu que tout cela dure quinze jours tellement c’était fort. Même le public de Twickenham chantait la Marseillaise ! 

Ma mère m'a toujours inculqué l'envie de gagner

Une personnalité a-t-elle marqué votre carrière ? Là encore, il y en a eu beaucoup. Francis Déjean à Narbonne. C’était, comme on dit, un dur au mal. Et quand il jouait derrière toi et que tu débutais, tu étais forcément plus à l’aise. Il y a aussi eu Guy Novès au Stade toulousain. Lui, c’est l’excellence. Il fallait toujours être au top, il nous inculquait la gagne. Je pourrais encore citer Jean Delmas, mon coach à Narbonne, Christian Labit, avec lequel j’ai joué à Narbonne, signé à Toulouse et que j’ai retrouvé à l’USC comme entraîneur. Lui, c’est un leader. Un ami qui m’a fait voir le rugby différemment. 

Votre mère et votre père ont-ils toujours été là ? Oui, Monique et Jean-Claude ont été mes premiers supporters. Ils étaient là pour ma première en bleu contre l’Irlande. Monique garde encore certains maillots, dont celui de Lomu que nous avons échangé en 1999 dans la salle de contrôle antidopage. Elle avait même gardé la boue de mes crampons après un match au Stade de France ! Ma mère m’a toujours inculqué l’envie de gagner et celle de bien faire. 

Qu’est-ce qui vous lie de façon aussi forte à Narbonne ? Je suis viscéralement attaché à cette terre. Je suis fan de Narbonne, cette ville est simplement belle. Partout où je suis allé, que ce soit à Toulouse, Paris ou en Angleterre, j’ai toujours gardé un oeil sur ma ville. J’aime marcher sur le cours de la République et retrouver ses halles, où j’allais avant et que je fréquente encore plus aujourd’hui… 

* Jo Gonzalez, ex-boxeur médaillé d’argent aux JO de Tokyo en 1964, créateur en 1968 du restaurant Chez Jo à Narbonne. 


Biographie express de Franck Tournaire
> 1972. Naissance à Narbonne et enfance à Sallèles-d’Aude, où il commence le rugby à 5 ans. 
> 1990. Premier match à 18 ans avec Narbonne contre Bourgoin. 
1995. Première sélection avec les Bleus en Coupe latine. 
> 1999. Année exceptionnelle. Premier des deux titres de champion avec Toulouse et finale de la Coupe du monde. 
> 2002. Premier joueur français à jouer à Leicester en Angleterre. 
> 2010. Fin de carrière avec l’USC sur le succès d’une montée en Pro D2. 
> 2017. Après plusieurs années à gérer les sites sportifs de Narbonne, il ouvre le restaurant Chez Franck.