HERCULE TERRASSANT L'HYDRE DE LERNE

Depuis deux ans, chaque hiver, le musée des beaux-arts de Carcassonne propose aux visiteurs de se retrouver dans « Le petit salon ». Ces expositions-dossiers permettent de mettre en lumière une œuvre des collections, de la découvrir ou la redécouvrir à travers des problématiques et thématiques diverses.

Cette année, c’est le paysage historique Hercule terrassant l’hydre de Lerne de Félix Théodore Caruelle d’Aligny qui a été choisi. En 1991, compte tenu de son état de fragilité ce grand format, 193 x 260 cm, avait été roulé sur un cylindre afin d’être protégé et stabilisé. Quinze ans plus tard, en 2016, la toile est déroulée dans les salles du musée où des restaurateurs agréés constatent le mauvais état de l’œuvre et préconisent des interventions fondamentales de restauration du support et de la couche picturale. L’intervention est programmée dans les ateliers de restauration du Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF), à Versailles. En 2019, après une restauration du support, de la couche picturale, et un remontage sur un châssis neuf, l’œuvre réintégre les murs des collections permanentes du musée des beaux-arts de Carcassonne. La restauration a pu mettre en évidence, par les couleurs retrouvées et le travail de la touche, des qualités esthétiques qui avaient disparu. Depuis, les visiteurs du musée peuvent observer la toile restaurée de l’un des maîtres du paysage français. En effet, Caruelle d’Aligny est un des premiers peintres à travailler sur le motif dans la forêt de Fontainebleau et, de ce fait, est considéré comme l’un des précurseurs de l’école de Barbizon. Il y est rejoint par ses amis et camarades Camille Corot (1796 – 1875), François-Edouard Bertin (1797-1871), Paul Huet (1803-1869), Jean-Paul Flandrin (1811-1902), etc. Ensemble, ils relèvent des motifs qu’ils reconstituent en des paysages élaborés à l’atelier, comme c’est le cas ici, ou peignent sur le motif en plein air.

Ce tableau, cependant, est caractéristique du paysage classique tel qu’on le conçoit au début du XIXème siècle. Dans ce paysage historique, Caruelle d’Aligny propose un thème mythologique. Après avoir étouffé le lion de Némée, Hercule, obéissant à Eurysthée, s’attaque à l’hydre de Lerne, animal monstrueux, vivant dans des marécages, en Argolide, sous un grand chêne et non loin d’une source. Le peintre a situé le deuxième travail du héros grec dans une nature verdoyante, effectivement envahie de chênes. Le paysage se structure en différents plans. L’action se noue au deuxième, mise en valeur par la lumière et cernée par le feuillage d’un grand arbre, en haut à gauche. Les rochers et les végétaux du premier plan, eux, servent de repoussoir à la scène qui se joue : Hercule est en pleine action, la massue levée prête à écraser l’une des têtes de l’hydre. La musculature athlétique du demi-dieu, protégée par la peau du lion, correspond bien au modèle connu. Cependant l’hydre se présente d’une façon tout à fait originale. Elle dresse deux têtes, certainement peu inspirées par les poteries ou les reliefs antiques. Le petit air narquois qu’elles abordent, pourrait presque les rapprocher à des illustrations pour enfant. Son long corps serpente dans un dégradé de verts particuliers à l’artiste.

Le musée des beaux-arts de Carcassonne possède un fonds riche de paysage du XIXème siècle, représentatif de l’évolution et de l’importance de ce genre pictural. Du paysage composé, hérité de Poussin, au néo-impressionnisme en passant par le romantisme, la peinture en plein air et le réalisme. Ainsi, l’exposition proposée met en lumière l’œuvre de Caruelle d’Aligny, accompagnée de ses contemporains excellant aussi dans ce genre.