Lutte contre les incendies, Pompiers

Hélène Sandragné : "il faut revoir le financement des Sdis"

Hélène Sandragné, la présidente du Département de l'Aude, a tenu une conférence de presse le lundi 1er septembre pour tirer les conséquences de l'incendie qui a ravagé les Corbières durant l'été. © Département de l'Aude

Trois semaines après l’incendie qui a parcouru 16 000 hectares dans le Massif des Corbières, Hélène Sandragné, la présidente du conseil départemental de l’Aude, a tenu ce lundi 1er septembre une conférence de presse pour tirer les conséquences de cette catastrophe. Au premier chef, le manque de moyen pour lutter contre les incendies et la nécessité de revoir le financement des services départementaux d’incendie et de secours.

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Revoir les moyens pour lutter contre les incendies


"Voilà trois semaines que le feu a ravagé le massif des Corbières faisant partir en fumée plus de 16.000 hectares. C’est le feu le plus important depuis l’après-guerre, c’est à dire depuis plus de 80 ans ! C’est dire l’ampleur de l’événement. Si le temps du retour d’expérience – le fameux RETEX – est venu et sera mis en œuvre par la préfecture, avec l’association des élus locaux, des maires notamment, je veux rappeler quelques éléments essentiels. 

Il est indispensable de souligner le manque de moyens réels de lutte contre les incendies en France et les difficultés de financement des services d’incendie et de secours, dont le modèle est à revoir.  Bien sûr, nous avons bénéficié d’une réelle mobilisation de la flotte aérienne nationale. Mais celle-ci reste sous-dimensionnée par rapport aux enjeux de notre pays. Les Canadairs sont vieillissants, les Trackers qui permettaient une intervention rapide dès le feu naissant sont inexistants aujourd’hui. Le président Macron avait déjà exprimé sa volonté de doter la France des moyens nécessaires après les incendies de Gironde en 2022. Trois ans plus tard, toujours rien !" 

 Il faut vraiment que l’État prenne ce sujet à bras-le-corps 

 

"Je ne dis pas que si nous avions plus de moyens ce feu aurait être circonscrit à une surface plus limitée, je n’en sais rien. Mais avec l’expérience et la légitimité que nous donne le fait d’avoir vécu telle catastrophe, il est essentiel pour moi de marteler ce message, porté aussi par d’autres, afin qu’il soit entendu. 


Comme doit être entendu que le financement des SDIS doit être revu. Il repose aujourd’hui exclusivement sur les collectivités territoriales – département, communes et intercommunalités. A partir de la fiscalité existante, il faut réfléchir à une nouvelle répartition.

Par ailleurs, le coût d’un tel incendie n’est pas neutre pour la collectivité que je préside. Le SDIS a dépensé près de 1,5 M€, et nous-mêmes près de 500.000 € pour la remise en état de nos routes. Le préfet m’a déjà sollicité pour connaître ses montants et je le remercie de s’en soucier. J’ai en parallèle adressé un courrier au ministre de l’Intérieur non pas pour « lui envoyer la facture » mais bien pour que le gouvernement nous précise ce qu’il compte faire concrètement." 

Agir pour le tourisme 

"Avec l’agence départementale du tourisme, en lien avec tous les professionnels du secteur, nous avons lancé une campagne « (re)venir c’est soutenir » qui est largement diffusé sur les réseaux sociaux. J’ai été interviewé à de nombreuses reprises par les médias nationaux sur ces enjeux et j’ai lancé cette sorte d’appel à la solidarité à tous les touristes : n’annulez pas vos vacances, et pour ceux qui souhaitent en prendre, venez chez nous ! Venir c’est nous soutenir. Mais venir, c’est aussi profiter de toutes les richesses patrimoniales de l’Aude. 

Certes 20.000 hectares sont partis en fumée depuis le début de l’été. C’est énorme, c’est trop. C’est un crève-coeur. Mais l’Aude, c’est 630.000 hectares de paysages magnifiques, de diversités géographiques, de beautés à couper le souffle. Les Corbières ne sont pas toutes atteintes et de nombreux lieux sont à découvrir ou redécouvrir."

Soutenir le monde agricole et viticole


"Les Audois ne s’y trompent dans cet élan de solidarité et l’on m’a rapporté que nombreux d’entre eux achètent du vin dans les caveaux des Corbières dont les territoires viticoles ont souffert du feu. Là aussi c’est un geste de solidarité et de soutien que je ne peux qu’encourager. 
Ce soutien au monde agricole et viticole, nous le faisons aussi à notre niveau, dans l’urgence du moment.

De nombreuses interrogations perdurent quant à la qualité du raisin présent sur les souches qui ont eu à subir les affres du feu et de l’épais nuage de fumée. Des analyses devront être menées sur les raisins afin de vérifier entre autres leurs propriétés organoleptiques. Ces analyses représentent un coût non négligeable dont je mesure qu’il ne peut pas reposer seul sur la profession viticole ni entièrement sur la Chambre d’agriculture. C’est pourquoi le Département contribue à hauteur de 50.000 € à ces analyses qui seront menées sous l’égide de la Chambre d’agriculture."

Et après ?
 

"Cet incendie est un désastre. Mais il doit aussi être un déclencheur d’actions à mener, de problématiques à cerner, d’orientations à prendre. Nous avons là la preuve irréfutable que le changement climatique frappe de plein fouet notre département, et dans celui-ci, les Corbières en particulier. 

Depuis trois semaines, J’ai passé beaucoup de temps dans les Corbières au contact des maires et des populations, comme j’avais été dans les communes qui ont aussi subi des feux au début de l’été 2025. J’y ai vu parfois de la détresse mais pas d’abattement, j’y ai vu bien souvent de la tristesse mais aussi une volonté farouche de trouver les solutions pour éviter que telle catastrophe se produise à nouveau. 


Nous ne manquons ni d’idées ni de solutions pour relever les enjeux qui sont devant nous. Mais je veux le dire clairement : refaire ce qui existait hier en espérant que cela nous protège et nous serve de modèle est un leurre.

 
Le Département de l’Aude sera en première ligne, avec la Région Occitanie, pleinement engagée aussi, et l’État via son représentant local, M. le Préfet, pour porter un plan cohérent d’ensemble. Avec Carole Delga, d’ici la fin du mois de septembre, nous reviendrons vers vous pour vous en présenter le contenu."

La gestion de l’urgence et la réactivité du Département  

« J’ai déjà eu l’occasion, dès les premiers jours, de souligner à la fois le courage et la valeur de nos sapeurs-pompiers, professionnels et volontaires, audois et des 80 autres départements qui sont venus prêter main forte, dans la lutte acharnée qu’ils ont menée. J’ai aussi eu l’occasion de mettre en avant le rôle si essentiel des élus locaux, les maires en première ligne, dans la gestion de la crise, dans l’urgence comme dans les jours et semaines qui ont suivi. 

Le Département a pleinement joué son rôle d’acteur principal des solidarités humaines et de l’action en mobilisant ses services au plus près des populations avec la mise en place d’aides financières d’urgence, de permanences sociales dans les zones sinistrées ou d’une carte d’entraide interactive sur la plateforme jeparticipe.aude.fr. 

Les situations ont été gérées en lien avec Aude Solidarité et l’association s’engage maintenant dans les situations parfois plus complexes. Nous avons travaillé en lien avec la MSA bien évidemment. À ce jour, le besoin de permanence ne se fait plus sentir mais bien évidemment les Maisons départementales des solidarités restent à la disposition des usagers du secteur. 

Le Département est aussi un acteur central des solidarités territoriales et là encore, nous nous sommes investis dès les premiers jours. Un modèle similaire à celui mis en place lors des inondations de 2018 est mis en place avec pour principes : un guichet unique de centralisation des besoins des collectivités via le site subventions.aude.fr, rubrique Incendie Corbières 2025 ; un accompagnement technique par l’Agence Technique Départementale et les agents de la cellule "aide aux communes" ; une répartition financière du fonds de solidarités « communes » géré en lien avec l’Association des Maires de l’Aude. »